Il a débuté comme chimiste en 1973 chez Chanel, et a construit au fil de ses collaborations un regard mêlant créativité et singularité. Son parti pris? L'exigence. Son plaisir? Le tête à tête. Pour nose Maurice Roucel revient sur quarante ans de carrière.

Quel est votre devise?

« Patience dans l’effort ». J’ai fait du triathlon à une époque !

Quel est votre plus ancien souvenir olfactif?

Je suis né à Cherbourg (Basse Normandie) en 1950, j'ai 4 ou 5 ans : sur la plage en été, l’odeur des baraques à frites et de l'ambre solaire.

Quelle est la principale chose que vous avez apprise d'Henri Robert chez Chanel au début de votre carrière en 1973?

J’avais 22 ans, j’étais passionné de chimie : organique et synthèse. Il avait 74 ans et il m’a engagé pour monter un atelier de chromatographie (une énorme innovation à l’époque). Il m’a donné une paix royale pendant 6 ans ; j’ai installé le labo, changé le matériel, monté les techniques de contrôle sur les concentrés, les matières premières ! J’ai appris qu’il faut donner la confiance aux gens.

Qu'est-ce qui vous plaît le plus dans l'idée du secteur de niche?

La parfumerie est un message. Travailler en tête à tête avec un client qui les mêmes valeurs, les mêmes exigences, la même passion pour pouvoir partager et prendre du plaisir comme deux tennismen qui se renvoient la balle, si possible avec une femme.

Quel est l'ingrédient avec lequel vous préférez travailler et pourquoi? Est-ce le magnolia (michelia longifolia)?

Je suis le premier à l’avoir utilisé. Monique Rémy m’a fait découvrir cette matière qui voyageait beaucoup et elle l’a découverte en Chine. J’ai dû l’utiliser sur un dosage très petit pour commencer et progressif pour ne pas tuer le jus, ni la matière première. Je l’ai utilisé la première fois pour Tocade de Rochas.

Quelles sont les qualités majeures que doit avoir un parfumeur?

Sur la tour gauche du Trocadéro à Paris, il est écrit « seul l’artiste se sent créé ; il créé comme il respire. » Cela évoque pour moi qu’on doit d’abord « maîtriser sa technique » pour exercer son métier tout en étant « ouvert » et « curieux ». Après, pour exceller dans son métier, il faut deux qualités qui sont innées et qui ne s’apprennent pas : la créativité et la passion.