Quel est votre parcours et qu’est-ce qui vous a mené vers D’Orsay ?

J’ai fait une école de commerce parisienne avec une spécialisation industries du Luxe, mais c’est le fait d’avoir grandi entourée de petites fioles de parfums qui m’a donné l’envie de me lancer dans l’aventure D’ORSAY j'imagine.
Mon père avait une « petite » marque de parfums à l’époque, des soumissions parsemaient son bureau, à côté de cela j’avais une passion pour les flacons miniatures très en vogue à l’époque, ma famille agrandissait ma collection à toutes les occasions, j’en avais sur tout un mur de ma chambre dans des vitrines et étagères dédiées!
Enfin j’ai très tôt associé mes parfums à des périodes de ma vie, c’est assez drôle de pouvoir découper mon existence en me repérant au parfum que je portais à cette époque. À chaque étape de ma vie, je choisis un nouveau parfum, c’est le marqueur d’un changement finalement.
Adolescente, je portais des "élixirs d’amour", puis CK One, finalement j’avais déjà les ingrédients de D’ORSAY à portée de main, de l’amour et du non genré!

La passion pour le parfum est familiale pour vous. Pourriez-vous nous en parler ?

Comme je le disais, mon père avait lancé une marque de parfums qu’il a ensuite cédée, cependant il a continué dans l’industrie et notamment dans le parfum d’intérieur. Ainsi naturellement les fragrances d’intérieur sont une évidence pour moi, ne pas parfumer ma maison, c’est comme sortir non parfumée ce qui m’est impossible! Que je reçoive du monde, ou seule, j’aime créer une ambiance olfactive, elle influe sur notre perception d’un lieu et de ce qui s’y passe. Cependant je ne suis pas une technicienne du parfum, j’avoue y évoluer de façon instinctive et intuitive, je m’entoure de personnes avec un nez et une vision affutée pour m’épauler!

Quel est votre souvenir olfactif le plus ancien ?

Mes plus anciens souvenirs remontent aux années 80…  dans la campagne normande, ma sœur (Mélanie Huynh) et moi y passions toutes vacances avant nos 10 ans, notre grand-mère y possédait une ferme, autant vous dire que les odeurs ne manquaient pas là-bas! Cependant je me souviens de son potager et de son jardin, les effluves de feuilles de tomates, de fraises des bois, de mûres, de framboises, de rhubarbes... se mêlaient à celles des cyclamens, lilas, œillets, coquelicots, jonquilles, chrysanthèmes et j’en passe selon les saisons. C’était un joyeux mélange! Plus précisément, je me souviens de l’odeur du riz au lait qu’elle marquait au fer rouge dans la cheminée, ainsi l’odeur du caramel se mélangeait à celle du grillé, du lait sucré et du riz, c’était complètement addictif!!

Quelle a été votre plus grande difficulté lorsque vous avez repris les rênes de la maison D’ORSAY en 2015 ?

La création de la maison D’ORSAY remonte à 1830, et c’est à ce moment qu’Alfred d’Orsay a créé la première fragrance de couple par amour pour Lady Blessington qu’il avait rencontrée en 1821. Depuis la Maison a toujours été active, elle a été reprise successivement, a connu des réussites et des revers, mais on parle de presque 200 ans de créations et d’histoire, sans compter qu’Alfred d’Orsay était un homme doté de multiples talents, ainsi le plus dur a été de décider de recentrer la marque sur son ADN pur, sur l’essence même de ce qui lui a donné naissance, de le raconter avec modernité autant dans les jus, le design des produits, la direction artistique, que les mots, car les mots sont importants chez D’ORSAY...
Nos parfums corporels explorent les états amoureux, tandis que nos fragrances d’intérieur posent le décor de rendez-vous amoureux, D’ORSAY finalement ne parlent que d’amour, l’amour de soi, l’amour fraternel, l’amour de l’autre, l’amour à plusieurs, peu importe les états amoureux, car ils sont universels. C’est la seule émotion qui peut littéralement nous mettre sens dessus-dessous.

Comment vous est venue l’idée des « instruments » olfactifs ?

Nos instruments sont nommés les fétiches et les totems, l’inspiration des noms semblent assez évocatrices.
En revanche, ce qui nous a inspiré pour le fétiche, c’est la notion de manque, le manque de l’autre… l’envie de le sentir quand il n’est pas là. C’est ainsi que le fétiche est né, une diffusion intime et intimiste, tout en jeu de transparence avec ces ajourages, qu’on peut glisser dans sa poche, dans un tiroir, poser sur son bureau, etc… chacun fait ce qu’il veut de son fétiche!
Pour ce qui est du totem, on est sur une diffusion plus intense, l’amour du beau et le jeu de l’ajourages caractéristiques du clair-obscur, m’ont donné envie de donner vie à cet objet, en laiton, réalisé en une seule pièce et sans couture, travaillé en France dans une atelier de joaillerie. Au-delà de sa diffusion puissante, c'est un objet à part entière.

D’Orsay propose aussi des bougies au format rechargeable. Comment avez-vous réussi à les développer ?

Notre bougie de 250g est avant tout un très bel objet de décoration. Ce verre sculpté de gaudrons, le piètement en laiton doré, le monogramme à chaud, son format en font un objet dont on n’aimerait pas se séparer. Elle met longtemps à se consumer, certes, mais c’est inévitable, alors nous avons tenu à prolonger la vie de cet objet en créant les recharges de cire parfaitement adaptées au contenant en verre. Oui, il y a eu des défis techniques pour proposer un pain de cire parfaitement adapté à notre moule, mais avec nos artisans nous y sommes parvenus et nous avons déjà fait bien plus compliqué.

Pourriez-vous nous parler davantage de cet iconique parfum unisexe à l’origine de la marque ? En quoi était-il révolutionnaire ?

Je ne sais pas si révolutionnaire est le mot adéquat pour décrire ce premier jus, pour nous en tout cas c’est la fondation de la Maison D’ORSAY. Vous savez, cette notion de storytelling, elle est très exploitée par toutes les marques dans tous les domaines et parfois, souvent même, on a d’abord le produit et après on écrit son histoire…
Nous n’avions pas besoin de créer une histoire, de l’inventer, ce qu’il a fallu c’est l’explorer dans ce qu’elle avait de plus pur et contemporain. D’ORSAY est né d’un battement de cœur, nous le disons souvent, c’est notre signature. Deux cœurs, celui d’Alfred D’Orsay et de Marguerite Blessington. Cette histoire d’amour véritable, interdite, pleine d’aventures et de passions - de quoi écrire un roman - est une vraie histoire. Ce premier parfum fut créé par Alfred pour le couple qu’il formait avec Marguerite. Et ceci constitue notre point de départ pour toutes nos créations : Quel état amoureux voulons nous évoquer ? Nos parfums sont tous des parfums de couple, des états amoureux, d’amour pour soi, pour l’autre, ce sont des vecteurs d’émotions ! Si il y a une révolution valable finalement c’est celle de l’amour non ? Il aura fallu 200 ans jusqu’à ce que l’on réinvente cette première fragrance avec Fanny Bal pour la relancer sous le nom « À cœur perdu. L.B. » en 2021.

D'où viennent les phrases que portent chacun des parfums ?

C’est le grand mystère, n’est-ce pas ? Et la Maison D’ORSAY n’en est pas dénuée. C’est même quelque chose que nous cultivons. Chaque phrase est une forme de déclaration, inspirée d’une personne qui évoque pour nous l’état amoureux souhaité, cela peut être une citation ou un clin d’œil à cette personne, d’où la présence d’initiales que nous ne révélons pas à l’exception de L.B pour Lady Blessington et G.A pour Grimod Alfred (le nom de famille d’origine d’Alfred d’Orsay), notre prochaine fragrance qui sortira en juin.
Il peut s’agir de personnalités contemporaines ou très anciennes, fictives même parfois mais existantes par des écrits.
Je trouve que c’est une façon très poétique de nommer les parfums et ceci nous différencie de beaucoup d’autres marques. Certaines personnes n’utilisent d’ailleurs que les initiales pour commander leur parfum.

Chaque nom de parfum est précédé par des initiales appartenant à une personne mystérieuse. Auriez-vous des indices à nous donner pour que l’on puisse trouver l’identité de leurs propriétaires (personnages réels, de fiction, etc) ?

Mises à part les deux exceptions mentionnées juste avant, je préfère laisser cette partie du mystère intacte ! Je pense que pour certains jus on peut le deviner en faisant un peu de recherches, mais nous préférons laisser libre cours à l’imagination de chacun. Les chanceux qui portent les mêmes initiales que nos fragrances seront ravis de se les approprier !

Si vous étiez un parfum d’Orsay, lequel seriez-vous ?  

Je ne suis pas très fidèle à une fragrance en particulier, mais toujours très fidèle à la Maison D’ORSAY.
Je reviens pourtant beaucoup à Je suis le plus grand. M.A. que je partage avec mon amoureux, à À cœur perdu. L.B. qui me suit délicatement et parvient à se fondre avec mes humeurs au fil des saisons, à Nous sommes amants. M.D. qui sent le Palo Santo (un bois que je fais brûler partout et qui m’accompagne) et déjà… déjà le prochain! Les deux prochains plutôt!

Quels sont les futurs projets de la maison ?  

Nous avons relancé D’ORSAY, il y a deux ans seulement avec 5 fragrances corporelles et 5 fragrances pour la maison, nous avons depuis travaillé avec passion pour proposer une sélection dans laquelle chacun puisse rencontrer l’état amoureux ou le rendez-vous secret qui le fera vibrer.
Désormais nous arrivons à 15 fragrances corporelles et 15 intérieures. Nous atteignons donc une forme de vitesse de croisière concernant les sorties de fragrances, notre rythmique privilégie désormais de vrais temps forts olfactifs ou objets. Nous sortirons cette année 2 fragrances corporelles avec Dandy or not. G.A. un Boisé Cuiré imaginé avec Sidonie Lancesseur qui sortira en juin et une autre fragrance cette fois ci orientale que nous sortirons en septembre.
2023 se prépare déjà et nous nous réjouissons des projets en cours avec de nouveaux parfumeurs.
Une nouvelle bougie très estivale arrivera en juin, et une édition spéciale est d’ores et déjà prête pour Noël bien sûr !… Nous continuons également d’explorer les modes de diffusion et proposerons de belles créations à partir de la rentrée, avec des collaborations qui s’inscrivent dans celles menées avec l’architecte designer Isabelle Stanislas ou l’artiste In Love Street art ! Chez D’ORSAY tout est une affaire de cœur et de rencontres.